Abed Azrié, pas prophète en son pays

Abed Azrié, pas prophète en son pays World. Le chantre du soufisme, né à Alep en Syrie, en concert pour deux soirs à l'Institut du monde arabe. BOUZIANE DAOUDI QUOTIDIEN : vendredi 28 mars 2008 Abed Azrié Institut du monde arabe, 1, rue des Fossés-Saint-Bernard, 75005. Ce soir et demain à 20h30. Rens. : 01 40 51 38 11 ou www.imarabe.org CD : Mystic (Doumtak/Nocturne). Aleppin de naissance et Parisien depuis 1967, le Franco-Syrien Abed Azrié anime la pensée soufie dans la musique orientale, mais de façon iconoclaste. Ce qui lui vaut quelques solides inimitiés. Mais d'autres l'admirent, comme Yehudi Menuhin, John Cale, Leonard Cohen, Caetano Veloso, Jeff Buckley, Peter Sellars, Astor Piazzolla ou René Char. Son public est universel, des Etats-Unis au Japon, beaucoup moins dans le monde arabe. Abed Azrié vient, avec son ensemble de musiciens franco-arabes, oud, violon, accordéon, contrebasse, percussion, chanter des textes des IXe-XIIIe siècles, comme en témoigne son dernier album sorti fin 2007. Il met sa voix chaude et profonde, ses compositions propices à la dévotion, au service notamment des écrits d'Al-Hallaj (le martyr du soufisme, décapité), Al-Niffari, Ibn al-Fared, Râbi'a Al Adawiya (ancienne musicienne, courtisane) ou Ibn Arabi, un temps emprisonné au Caire, le plus grand penseur soufi. Mohyiddin Ibn Arabi est né en 1165 à Murcie, en Espagne, dans une famille d'aristocrates et de savants juristes. En 1172, il suit sa famille à Séville, où il effectue des études classiques et devient secrétaire à la chancellerie. Mais, il abandonne sa carrière de lettré, suite à une grave maladie, et fait une retraite de plusieurs mois sous la direction du maître spirituel Al-Urayni, originaire du Portugal. Il part à La Mecque, visite l'Egypte, Jérusalem, Hébron, Bagdad, Mossoul, Qonya, s'installe en Syrie où il meurt en 1241. Ibn Arabi laisse des centaines d'écrits, comme l'Interprète des ardents désirs, ou le Livre des gemmes de la sagesse, des réflexions sur la musique, l'unification des religions en une seule «religion de l'amour». Abed Azrié souhaite, lui, unifier l'émotion et la pensée. Il est né à Alep, dans le nord de la Syrie, au carrefour de l'Europe et de l'Orient, haut lieu soufiste jusqu'à aujourd'hui, cité considérée comme la plus mélomane du monde arabe. Après avoir étudié la littérature arabe à Beyrouth, il a approfondi à Paris ses connaissances musicales à l'école Martenot, puis à l'école Normale. Il a aussi étudié au Louvre le poème sumérien l'Epopée de Gilgamesh, l'un des plus anciens textes de l'humanité, datant de 2 500 ans avant J.-C., dont il a fait une adaptation musicale en 1977 (rééditée en 1994). Azrié a signé une vingtaine d'albums et plusieurs BO de films. En 2005, il revisite Satie avec oud, vièle et harpe, retrouvant les premières musiques du compositeur français inspirées du Haut Moyen-Age et marquées de sonorités orientales. Il a également mis en musique les plus grands poètes arabes classiques, les quatrains audacieux et érotiques du Perse Omar Khayyam, les auteurs andalous du XIe siècle, ou contemporains, comme le Palestinien Mahmoud Darwiche.