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Incandescente Jeanne d'Arc au bûcher
ÉVÉNEMENT | 00h25 L'oratorio dramatique de Paul Claudel et Arthur Honegger revit pour un soir à l'Auditorium Stravinski de Montreux en version de concert. Christian Brun | IMPOSANT Un chœur de 130 chanteurs et neuf solistes, un orchestre de 65 musiciens. Et l'actrice Anne Richard, ici en répétition.Montreux, le 4 mars 2008 MATTHIEU CHENAL | 06 Mars 2008 | 00h25 René Falquet a pris son bâton de pèlerin pour réaliser son vieux rêve de monter, une fois, Jeanne d'Arc au bûcher, le vaste oratorio dramatique de Paul Claudel et Honegger. Il a commencé par en faire travailler quelques extraits à son Chœur de l'Elysée de Lausanne pendant trois répétitions. Et a demandé à ses chanteurs s'ils étaient prêts à se lancer dans cette aventure. «Ils m'ont cru et ont dit oui, commente le chef de chœur. Les chanteurs ont bien senti que cette œuvre est un sommet, mais la musique s'est révélée à eux progressivement. La polytonalité perturbe l'oreille, il faut ruser, trouver ses repères, intérioriser cette ambiance sonore indéfinissable. Aujourd'hui, ils se rendent compte à quel point c'est beau et ils marchent à fond.» L'adhésion du chœur n'était qu'une étape et René Falquet a dû faire face à bien des rebondissements. Avec le renfort du Chœur Pro Arte de Sion, il était prévu de faire une escale en Valais. Hélas, aucune salle ne pouvait accueillir 130 choristes, neuf solistes et un orchestre de 65 musiciens dont deux pianos et des ondes Martenot. Anne Richard incarne Jeanne L'orchestre français avec lequel il avait envisagé une coproduction a fait défection, ainsi que l'actrice française prévue pour le rôle-titre (Romane Bohringer, qui l'avait déjà interprété auparavant). Du coup, le chef s'est tourné vers les ressources du cru en faisant appel à l'orchestre de l'USDAM, qui réunit les meilleurs instrumentistes indépendants de Suisse romande, et en demandant à l'actrice Anne Richard d'incarner Jeanne. «C'est moi qui l'ai choisie, précise René Falquet. Elle a ce regard pénétrant, ce côté sportif et énergique qui la rend crédible. Et elle ne joue pas trop à la comédienne. Il faut toujours se souvenir que Jeanne a 19ans quand elle meurt. Anne Richard n'avait jamais travaillé sur une partition, et son rôle parlé exige une prosodie rythmée. Elle a beaucoup sué, pris des leçons de solfège. Aujourd'hui, c'est une partition qui l'habite totalement.» Visiblement, René Falquet est lui aussi habité par la matière du drame de Honegger et Claudel. Il en parle avec un enthousiasme débordant: «Claudel a eu cette idée où Jeanne sur son bûcher revoit sa vie en une fraction de seconde et où frère Dominique lui explique son destin. Les séquences chantées sont l'illustration de cette histoire. Mais tout est au second degré, comme la scène du procès délirant, inspiré à Claudel par la Messe des fous à Douai au Moyen Age et par Molière se moquant des médecins. Musicalement, c'est à la fois parodique et très construit, l'onde Martenot se met à gicler, l'idéal serait que le chœur devienne fou, et le chef aussi!» D'après René Falquet, la dernière version de concert en terre vaudoise date de 1964 avec Robert Mermoud. Mais, septante ans après sa création - c'était à Bâle le 12 mai 1938 - il était plus que temps de faire revivre ce monument musical incandescent. Montreux, Auditorium Stravinski, demain à 20 h 15.Loc.: 021 962 21 19 et www.saisonculturelle.ch