Le Figaro - Théâtre : Quatre pices de Feydeau, irrésistibles cocasseries
Le Suisse Gian Manuel Rau dont on avait admiré il y a quelques saisons, à Sceaux, Le Pélican de Strindberg avec Dominique Reymond, réunit quatre pièces en un acte de Feydeau, connues pour les trois premières, très connues pour la dernière : Amour et piano, Un monsieur qui n'aime pas les monologues, Fiancés en herbe, et enfin Feu la mère de Madame, œuvre par laquelle l'écrivain fit son entrée au répertoire en 1941, soit vingt ans après sa mort. La Comédie-Française excelle dans ce registre et il y aurait une histoire à écrire sur la façon dont l'auteur de La Dame de chez Maxim a été interprété au fil du temps. La manière dont Gian Manuel Rau lie les quatre « actes uniques » est intelligente. Amour et piano repose sur un quiproquo amusant : une jeune fille attend son professeur de piano, c'est un jeune homme ambitieux qui croit arriver chez une actrice mondaine qui surgit... Dans Un monsieur qui n'aime pas les monologues, nous sommes un peu dans le monde du théâtre tandis que dans Fiancés en herbe, Henriette 9 ans et René 11 ans, apprennent Le Corbeau et le Renard et s'interrogent sur le pourquoi du : « de la fontaine » (sic) alors qu'il n'est question que d'animaux ! Enfin dans Feu la mère de Madame, un homme rentre au petit matin chez lui... la dispute est interrompue par l'annonce du décès de la maman d'Yvonne. Mais...
Critique
S'appuyant sur une équipe artistique qu'il connait bien, le metteur en scène opte pour une version résolument cocasse des œuvres. Il écoute Feydeau et, pour datées que soient les situations, l'écriture est si forte que l'on ne se soucie en rien des références à un autre temps : seule compte la folie qui s'empare de chacun... en toute logique. Scénographie, costumes, tout s'accorde à nous donner le sentiment d'un théâtre percutant, vif, direct. La musique, très travaillée - avec la présence des ondes Martenot - donne une unité à la représentation, qui se développe à très vive allure, portée par quatre virtuoses se partageant dix rôles avec maestria. Quelle équipe ! Léonie Simaga avec un sérieux imperturbable est Lucile puis Annette, Anne Kessler est magnifique, survoltée, imaginative en Henriette puis en Yvonne. Laurent Stocker est toute finesse et burlesque très tenu dans Édouard, René, Lucien, et Christian Hecq, récemment entré dans la troupe, prête son génie comique sans ostentation à Baptiste, Ernest, Joseph. Un régal !
Quatre pièces de Feydeau, Théâtre du Vieux-Colombier, 21, rue du Vieux-Colombier (VIe). Tél. : 01 44 39 87 00. Durée : 1 h 40. Places : de 8 € à 28 €. Jusqu'au 25 octobre.