Ondes aux Lilas
LILAS ICI, FÊTE AUTREMENT
Heureusement, il est impossible de décrire une musique, elle n’est pas réductible à des mots, il faudrait simplement pouvoir la faire entendre.
Lors du concert nocturne du 21 juin, les morceaux joués, interprétés (comme si l’été se voulait déjà au pluriel), possédaient tous leur propre personnalité, leurs caractéristiques et leur existence unique et fugace.
Le Flux, de Judith Ring, démontrait, grâce à Nathalie Forget, que les ondes Martenot avaient capté la vibration de l’air – en tant que propagation libre – d’une manière envoûtante, céleste.
Un Martenot sans maître… qui n’aurait pas déplu à Pierre Boulez.
Trans, de Pascale Criton (1), réussissait, à partir des deux guitares accordées en 1/12e de ton, jouées minutieusement par Estelle Lallement et Filipe Marquès, à créer un univers de légers décalages, de répétitions infinitésimales et de différences quasi imperceptibles, modulant un chant lancinant (un plein-chant) que ces instruments pourtant « classiques » révélaient durant dix-huit minutes.
Performance K IV (ondes et laine) a permis à Nathalie Forget, créatrice et interprète de l’œuvre sur son instrument martelé, de donner lieu à un spectacle étonnant (quatre minutes) où sa bouche dévide à la fin – comme dans un cauchemar que j’ai rencontré il y a quelques jours et dont je lui parlais ensuite à cause du hasard de la collision – un long ruban qu’elle avait enfoui dans la gorge et qu’elle extirpe comme une cascade musicale blanche et ininterrompue.
Exercices de présence I laisse libre jeu à Hugues Genevois, à la guitare électrique, pour faire éclater toutes les possibilités de l’instrument, dans la lignée déjà lointaine d’un Jimi Hendrix mais auquel on ne peut s’empêcher de penser, les stridences et les battements traduisant l’amplification de la création.
Après l’entracte, Hugues Genevois (qui a travaillé, entre autres, avec György Kurtag jr.) remontait à l’assaut du son avec ses Exercices de présence II & III, linéaments électroacoustiques fusant brillamment dans le noir.
Plis pour ondes, de Pascale Criton (cinq minutes) remettait Nathalie Forget à la commande de son instrument, lui obéissant au doigt, à l’œil et à l’oreille dans une perspective forcément « deleuzienne ».
Il était logique (en un sens) que la soirée se termine par le Froissement d’ailes, de Michaël Levinas, interprété – de manière inoubliable – par la même Nathalie Forget.
Dehors, la nuit jouait sa propre musique et celle des étoiles ne semblait silencieuse qu’en apparence.
Voir les photos sur le site : http://hadominique75.wordpress.com/tag/les-ondes-martenot/